Ce que je trouve difficile avec ma dépression récurrente ce sont les efforts que je dois faire pour exécuter des tâches qui, au premier abord, semblent simples au commun des mortels. Commencer un tableau est difficile pour moi. Il y a une petite voix qui me chuchote que je serai tellement mieux dans mon lit et qu’il serait mieux d’attendre un autre jour pour le commencer. Avec la dépression, tout est un combat. Du lever au coucher, il faut sans arrêt se battre avec soi-même pour ne pas tomber dans l’immobilisme. Avec le temps, le combat est de plus en plus difficile. Peut-être que le vieillissement n’aide pas ? Pour beaucoup de gens que je rencontre, la dépression n’est pas une maladie, elle n’est pas réelle. Je reçois souvent des conseils pour « prendre sur moi » ou « ne pas me laisser aller. » Mais je ne demande que ça ! On n’est pas dépressif par choix ou pour se donner un genre. C’est une maladie qui ronge l’individu lentement et qui lui retire peu à peu l’espoir d’un répit.
La dépression c’est un étau qui vous broie sans cesse l’estomac, un trou qui vous aspire sans arrêt et une voix intérieure qui essaye de vous persuader que rien ne vaut la peine. Heureusement qu’il y a des médicaments qui aident au combat, mais ces médicaments viennent avec des effets secondaires. Rien n’est offert gratuitement dans ce monde. Il y a toujours un prix à payer. Parmi les effets secondaires pénibles pour moi, il y a les tremblements. Ces derniers sont difficiles à gérer quand on est peintre et que l’on a besoin de précision. Il y a des jours où je dois peindre à deux mains pour pouvoir faire les détails dans mes tableaux Zafers. Le coude gauche doit être posé sur le bras de mon fauteuil et de la main gauche, j’attrape ma main droite au niveau du poignet pour la stabiliser. C’est pour cette raison, je ne peux plus peindre debout comme je le faisais il y a vingt ans. Le fauteuil est une nécessité aujourd’hui. Les jours où les tremblements sont ingérables, je ne peux simplement pas peindre. Une autre difficulté que je fais face est la difficulté à faire face au public. Par exemple, le vernissage d’une exposition de peinture est extrêmement difficile pour moi et une activité publique est une grosse épreuve qui me draine de mon énergie pendant plusieurs jours. La peinture est donc pour moi une activité solitaire plus par nécessité que par choix.
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